La boxe, une approche philosophique

Cela fait un petit temps que je pratique la boxe, j’ai choisi ce sport parce que j’y vois la possibilité d’exercer ma philosophie et de développer mon corps. La philosophie entretient un lien étroit avec les sports de combat et arts martiaux . Le stoïcisme nous invite à se détacher du corps, mais ce n’est pas pour autant qu’il faut le laisser de côté. Le culte du corps comme seule finalité est une erreur, mais il faut veiller à l’entretenir car c’est une part de moi, le reflet de mon âme.

« Que la santé de l’âme soit donc le principal objet de tes soins ; tu pourvoiras, mais seulement en second lieu, à celle du corps, qui te coûtera peu, si tu ne veux que te bien porter. »
Sénèque, Lettres à Lucilius

Ce qui m’a tout de suite plu dans ce sport, c’est les vertus qu’on peut développer. Je pense à l’humilité : aux sprints, aucun jeune ne se fera battre par un vieillard de 65 ans, mais à la boxe tout est possible. Les jeunes hommes ont tendance à se croire supérieurs, trop sur d’eux, surtout en terme de puissance, parce qu’ils sont dans un âge qui permet beaucoup. Mais de cette puissance, ils ne possèdent que la machine et pas la maîtrise, le mode d’emploi. Quand on est dans un âge très vivant, on a une force certaine mais qu’il faut apprendre à façonner pour la rendre pure.

Ce n’est pas la brute qui gagne, c’est celui qui à une maîtrise totale de lui même, qui canalise son énergie et recherche la précision. Tous les boxeurs le diront, c’est la précision,  la vitesse et l’agilité qui comptent, ensuite, vient la puissance. 

Ce sport permet de s’exercer au contrôle de soi : celui qui se laisse dominer par les émotions se fera rétamer. J’ai déjà vu des nouveaux qui s’étant mal protégés, prennent un coup un peu dur et le prennent pour une attaque personnelle. Ils veulent dès lors se venger (on le voit dans le regard), et cherchent à s’acquitter de cette tâche le plus rapidement possible avec le plus de force possible. Ils ne raisonnent pas, aveuglés par l’émotion, baissent par manque d’attention leur garde, et se reprennent un coup dur. J’aime beaucoup cette phrase de Marc Aurèle qui prend tout son sens ici :

« L’art de vivre ressemble plutôt à la lutte qu’à la danse en ce qu’il faut toujours se tenir en garde et d’aplomb contre les coups qui fondent sur nous et à l’improviste. »  Marc Aurèle, Pensées pour moi même

Pugiliste des Thermes

Vous apprenez à prendre ou reprendre le contrôle de votre esprit, et vous initiez à l’inconfort :

  • C’est un sport très exigeant, il faut surmonter l’adversité, être en inconfort physique : peu de gens aiment se faire taper, or une partie de la vie consiste à se faire taper dessus. 
  • On se confronte à ses appréhensions : monter sur un ring peut être impressionnant mais c’est en faisant face à ses peurs que l’on devient courageux.
  • C’est également un bon moyen de rendre l’esprit plus résistant en sortant de sa zone de confort : je croise souvent des obèses lors des entraînements qui sont à deux doigts de rendre l’âme à cause de l’intensité des exercices mais ils le font. Alors que généralement, ils préfèrent se mettre au sport dans leur coin, chez eux, par peur du regards des autres. Or il n’y a rien de plus respectable qu’un homme au fond du trou qui prend conscience et change la donne. Aller à un cours de boxe, c’est jeter son ego en pâture à soi-même parce que vous serez misérables au début, incapables de boucler ne serait-ce que l’échauffement, vous serez misérables dans les exercices, vous vous ferez probablement battre par un vieillard ou un nain, vous suerez à grosses goûtes mais vous vous serez confrontés à la difficulté : c’est ce qui compte.    

La philosophie, ce n’est pas uniquement une pratique abstraite où l’on pense assis sur une chaise. La philosophie se vie, elle se pratique au quotidien et le sport a toujours été une pratique philosophique exigeante. 

Mais aujourd’hui la caste des philosophes ne rencontre plus celle des sportifs et vise versa. Nous vivions dans une époque d’ultra-spécialisation des individus dans certains domaines, ce qui empêche à l’homme d’être complet, un homme modéré. Les philosophes antiques étaient de grands sportifs (Platon…). Il faut s’attacher en priorité à l’âme, à nos pensées car nous les contrôlons, mais nous ne contrôlons pas notre corps, je peux naître malade et ne rien y faire, la beauté se fane, les muscles deviennent flasques mais mes pensées elles restent inchangées.  Il faut tout de même entretenir le corps pour ne pas qu’il dépérisse trop vite et mes pensées avec. 

« Il est déraisonnable, mon cher Lucilius, il ne convient nullement à une personne cultivée de passer son temps à faire travailler ses bras, à s’élargir l’encolure, à se fortifier la poitrine. Quand tu auras achevé un bel engraissage, quand tes muscles auront pris du volume, jamais tu n’égaleras la puissance d’un gros bœuf, jamais tu ne pèseras autant. »
Sénèque, Lettres à Lucilius

La boxe nous permet d’atteindre une sagesse pratique : discipline dans l’exécution  mais aussi dans l’esprit, une visualisation du réel pour mieux l’interpréter et y répondre de la manière la plus adaptée avec courage. Patience et humilité, on ne devient pas un guerrier en 2 jours et l’on apprend à mettre son ego de côté et accepter d’être au niveau le plus bas tout en sachant qu’on ne peut que s’améliorer. Et le respect envers celui qui se tient à côté et s’efforce lui aussi d’abattre ses obstacles. Le ring est une allégorie de la vie, il peut se montrer violent, engendré la souffrance, tuer dans le pire des cas, mais il féconde également la beauté, l’élégance et la force d’âme. 

Je vous laisse sur cet extrait de Bruce Lee dans Bruce« Psychologie de la défense et de l’attaque » : 

« La taille n’est jamais une indication de puissance ou d’efficacité, ainsi que le savent fort bien les maîtres de boxe chinoise. L’homme le plus petit s’en sort par l’équilibre de son pouvoir, par sa plus grande agilité, sa souplesse, la rapidité de ses pieds, et la nervosité de son action. Gardez cela à l’esprit lorsque vous rentrez en action : déséquilibrez-le sans vous préoccuper de sa taille. Soyez plus rapide que lui et ne prêtez aucune attention à sa taille, à son arrogance, à ses féroces contorsions du visage, ni même à son langage agressif. Votre objet est toujours de frapper votre adversaire à son point le plus faible, à savoir à la hauteur de son centre de gravité, déséquilibrez-le, et appliquez le principe du levier afin que son corps soit l’instrument de sa propre défaite : « the bigger they are, the harder they fall ». En combattant un homme avec vos mains nues, vous devez apprendre à utiliser votre tête, vos genoux, vos pieds aussi bien que vos mains. Le corps à corps vous donne l’opportunité d’utiliser ces parties de votre corps, et tout particulièrement vos coudes. Gardez bien ce point en mémoire : lorsque vous êtes attaqué par un voyou, ce dernier n’a qu’une idée en tête, sa pensée se limite à votre seule destruction. Dans ce cas, l’avantage est de votre côté. »

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